Subrogation en assurance de personnes : l’action directe est dans le périmètre du recours (Analyse)

Lundi 4 janvier 2021

Article de Maître Domitille FLAGEUL, Avocate

Par une décision du 26 novembre 2020, la Cour de cassation reconnaît, par l’effet de la subrogation conventionnelle, l’action directe de l’assureur de la victime contre l’assureur du responsable en assurance de personnes. Une analyse de Domitille FLAGEUL, avocat à la cour au sein du cabinet CHOISEZ & ASSOCIES.

Il faut parfois se méfier des certitudes acquises de longues dates. En assurance de dommage (L.121-12 du code des assurances), l’assureur bénéficie d’une subrogation légale dans les droits de son assuré qui l’investi de l’action directe contre le responsable du sinistre ou son assureur. En assurance de personne, cela devrait être l’inverse, pas de subrogation et pas d’action directe

Pourtant, c’est tout l’enseignement de l’arrêt du 26 novembre 2020 (Civ. 2e, 26 novembre 2020, n°19-23.023) qui a reconnu l’action directe contre l’assureur du responsable en assurances de personnes, sans même s’arrêter à la lecture du contrat.

Faits

Un jeune sportif a été victime d’un accident de la circulation alors qu’il s’entraînait sur un circuit automobile géré par une association. L’assureur de la victime a pris en charge le sinistre en exécution d’un contrat comportant une garantie corporelle conducteur et a formé une demande reconventionnelle contre l’association et son assureur afin d’obtenir le remboursement des provisions payées à son assuré.

Par arrêt du 4 juillet 2019, la Cour d’appel de Douai a débouté partiellement l’assureur de la victime de sa demande de rétrocession aux motifs que son recours conventionnel ne pouvait être effectif qu’à l’égard du responsable du sinistre et non son assureur.

Pour motiver sa position, la Cour d’appel de Douai se réfère à la clause 9.80 « subrogation » de la police d’assurance souscrite en 2012 qui prévoit que l’assureur est subrogé dans les droits et action de son assuré contre tout responsable du sinistre à concurrence de l’indemnité payée.

Par une lecture stricto sensu de la clause contractuelle, la Cour d’appel du Douai a purement et simplement rejeté la demande de l’assureur de la victime considérant que le remboursement des provisions ne pouvait être sollicité qu’à l’égard du responsable de l’accident.

Décision

La Cour de cassation a censuré l’arrêt au visa des articles 1250,1° (dans sa rédaction antérieure à 2016), L.131-2 alinéa 2, L.124-3 et L.211-25 du code des assurances aux motifs que « par l’effet de la subrogation conventionnelle, l’assureur de la victime est investi de l’action directe contre l’assureur du responsable ».

Par cet attendu de principe, la Haute Cour précise que par l’effet de la subrogation conventionnelle prévue aux articles L. 131-2 et L. 211-25 du code des assurances, l’assureur de la victime d’un dommage résultant d’une atteinte à la personne est investi de l’ensemble des droits et actions dont celui-ci disposait contre la personne tenue à réparation ou son assureur (L.124-3 du code des assurances).

Ainsi, l’assureur qui bénéficie d’une subrogation conventionnelle dans les droits et actions de l’assuré qu’il a dédommagé à l’encontre de la personne tenue de réparer le dommage dispose de la plénitude des actions que son assuré aurait été admis à exercer.

Dans le cas d’espèce, après avoir fait signer à son assuré une quittance subrogative attestant du versement des garanties contractuelles, l’assureur de la victime était donc pleinement investi de l’action directe de son assuré à l’encontre de l’assureur du responsable.    

Commentaire

Par cette décision, la Juridiction suprême s’est attachée à démontrer que dans le cadre d’une subrogation conventionnelle l’action de la victime du dommage se transmet directement à son assureur, quelles que soient les dispositions contractuelles, et ce même en assurance de personnes.

A nouveau, la Cour de cassation démontre que le droit des assurances est une école de logique et de subtilité.